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Chef Aby | Africain.info | mardi 4 juin 2019
Camair-Co, la compagnie camerounaise de navigation aérienne, vient de connaitre la débâcle de sa cinquième équipe dirigeante, en seulement neuf ans. Ce fleuron de l’aviation au sud du Sahara jusqu’en 1998, spécialisé dans le transport aérien de marchandises et de passagers, a mal à sa restructuration et présente plutôt des signes d’agonie.
Monsieur Njipendi Kouotou Louis Roger, a été nommé par un décret présidentiel du 27 Mai dernier, nouveau directeur général de Camair-Co [photo], en remplacement de M. Dikoum Ernest, qui était en poste depuis seulement depuis le 22 août 2016. Le nouveau DG, laisse sa place de président du conseil d’administration à l’actuel ministre camerounais des Transports, M. Ngalle Bibehe Massena Jean Ernest. Au poste de directeur général adjoint, Monsieur Mve Max Constant a été nommé pour remplacer Monsieur Habouba Moussa.
La désillusion d’Ernest Dikoum
Il faut dire que la manière de démettre cet ancien responsable Afrique de l’Ouest d’Emirates, de la direction de Camair-co a été peu honorable. Certes que la rumeur courrait depuis un moment sur l’éviction d’Ernest Dikoum. Il en a été chaque fois pareil pour ses prédécesseurs. Notamment Alex Van Elk, en 2012 ; Matthijs Boertien, le 11 septembre 2013 ; Frédéric Mbotto Edimo, en 2014 ; puis Jean Paul Nana Sandjo, le 22 août 2016. C’est par un décret présidentiel du 11 septembre 2006 que Cameroon Airlines Corporation (nom d’usage : Camair-Co) est née sous les cendres de Cameroon Airlines (nom d’usage CAMAIR) elle-même créée le 26 juillet 1971 par le président Camerounais de l’époque El Hadj Ahmadou, retirant le Cameroun d’air Afrique dont il a été l’un des 13 principaux acteurs de la création par un traité à Yaoundé en 1961. Camair qui avait un capital de 1,5 milliard de francs CFA et une importance flotte au départ, a connue ses premières turbulences en gestion dans les années 90, avec la dévaluation du franc cfa en 1994. Depuis lors la compagnie multiplie des turbulences. Elle a même été placée sur la liste noire, et interdite de vol en France par la DGAC en 2005, pour de nombreux écarts aux normes internationales notamment dans le domaine du chargement des appareils, du transport de marchandises dangereuses, de la documentation nécessaire à la navigation et de la maintenance des pneumatiques…
Ambitions abattus en plein vol
Pour contourner cette difficulté, Camair a été déclarée morte en 2006 et Camair-Co a vue le jour pour la succéder, mais avec les mêmes difficultés. Un plan de redressement pensé par des experts, mais n’a jamais été véritablement mis en place. C’était la mission confiée à chacun des cinq directeurs généraux qui se sont succédé à la tête de la compagnie depuis ces neuf dernières années.
En prenant les commandes en 2016, le denier Directeur général limogé la semaine dernière, avait la mission de conduire un plan de relance qui allait porter la flotte à 14 avions à l’horizon 2019. En 2019, roulement de tambour... des six avions du départ, seulement deux sont en service : un MA60 et un Bombardier Q400 en location, qui assurent neuf (09) petites destinations, et aucun vol international autorisé. Alors que, comme le relève Wilfried Ekanga, tout à côté, Éthiopian Airlines qui a acquis son autonomie totale en 1975, soit quatre ans après la création de la Cameroun Airlines, est la compagnie africaine qui dessert le plus de destinations internationales dans le monde, environ 125, devançant même l’Afrique du Sud et l’Egypte. Elle possède à ce jour, exactement 100 avions en service, et en a commandé 68, dont une quinzaine au constructeur européen Airbus. Il y a quatre ans, en Finlande, Ethippian Airlines a même remporté le prix de la compagnie aérienne de l’année, devant des mastodontes comme American Airlines, l’allemand Lufthansa ou encore Air France-KLM, le numéro Un mondial.
La compagnie croule sous le poids de ses dettes
Au Cameroun, c’est toute la classe politique et la société civile qui s’insurgent contre cette « navigation à vue » de la compagnie nationale qui faisant la fierté des populations. On se demande si Paul Biya, le président de la république, est bien conscient du degré de la gravité de la situation. Pourtant, en Suisse où il a ses habitudes (il y passerait environ 4 mois de sa vie par an), l’aéroport de Genève-Cointrin, qui n’est classé que le 34ème en Europe, accueille grosso modo 18 millions de passagers par an, soit 90% de la population du Cameroun. Pourtant la Suisse est trois fois moins peuplée.
Pour sauver Camair-Co de sa mort lente, l’expert en aéronautique, Monsieur Nyounaï Nyounaï a proposé un certain nombre d’actions, au rang desquelles l’achat d’outil de production moderne (avions). L’Etat n’arrive pas à respectes ses engagements du plan de la restructuration proposé par Boeing Consulting il ya quelques années. Il s’agissait d’injecter dans les caisses de la compagnie dont il est le principal actionnaire, une somme de 60 milliards de FCFA, pour sa relance ; le quantum de sa dette étant évalué à 35 milliard de franc CFA. Rien n’a été fait à ce jours, plus de 5 ans après.
CHEF ABY