La situation de la liberté de presse au Cameroun est des plus préoccupante en ce moment. Plusieurs professionnels de médias sont emprisonnés sans procès, d’autres poursuivis en justice et même condamnés à de lourdes peines, c’était le cas de trois journalistes vendredi dernier. [photo : le journaliste Christophe Obiokono condamné à 2 ans de prison]
L’Ong internationale Reporters sans frontières (Rsf) et certains parlementaires français continuent de dénoncer la détention sans jugement, depuis 41 mois déjà, de l’ancien directeur général de Cameroon Radio Television (CRTV), Amadou Vamoulke. Beaucoup d’autres journalistes sont eux aussi, dans la même situation, c’est le cas de Lewis Medjo, le directeur de publication du journal Détente Libre ; De même que le cas du journaliste blogueur, Paul Tchouta, qui croupit sans jugement, depuis plus de six mois, à la Prison centrale de Yaoundé, pour une insidieuse affaire de diffamation.
LOURDES CONDAMNATIONS DE JOURNALISTES
Vendredi dernier, 20 décembre, ce sont d’autres professionnels de la communication, en la personne de Christophe Obiokono-Obiokono, Directeur de publication de l’hebdomadaire Kalara, et ses collaborateurs, Mbezele et Melingui, qui ont été condamnés à des peines d’emprisonnement, après un procès qui a duré pratiquement 20 heures, devant le Tribunal correctionnel de Yaoundé Centre Administratif. Il est reproché aux journalistes de s’être intéressés à une affaire qui oppose la cliente de Madame Fotso Chebou Kamdem Faustine Villanneau, avocate au barreau du Cameroun (par ailleurs député du parti au pouvoir à l’assemblée nationale du Cameroun), contre l’ancien bâtonnier de l’ordre des avocats du Cameroun, Me Akere Muna, alors candidat déclaré à l’élection présidentielle de l’année dernière.
Les trois journalistes de Kalara ont écopés chacun, de deux années d’emprisonnement avec sursis pendant trois ans. Des condamnations assorties de 10 millions de francs CFA (soit environ 15.000 €) de dommages et intérêts et 2,5 millions FCFA (autour de 3815 €) d’amendes.
BALLONNEMENT DE PRESSE
Les juges du Tribunal correctionnel de Yaoundé Centre Administratif ont donc eu une fois de plus, la main assez lourde sur les journalistes. En fait, le journal de Christophe Obiokono-Obiokono avait publié deux articles, dans ses parutions des 23 et 30 octobre 2018, dans lesquels il avait fait état de propos tenus par Maître Fotso Chebou Kamdem, lors d’un dîner dans la ville de Yaoundé, propos que l’un des convives avait enregistrés discrètement. Elle y fait état de manœuvres dont elle aurait usé pour emmener les juges à aller dans son sens, dans le dossier en procès entre Maître Akere Muna contre l’ancienne ministre Ama Tutu Muna. Jugeant ces propos diffamatoires, la député Fotso Chebou Kamdem poursuit le directeur de Kalara et ses collaborateurs (Irène Mbezele et Odette Melingui), en diffamation et outrages à corps constitués.
Maître Claude Assira, l’avocat des journalistes, qui a déclaré qu’ils feront appel de jugement, estime que « c’est une autre atteinte flagrante à la liberté de presse au Cameroun ». Maître Assira est offusqué de ce que : « Toutes nos demandes de report ont été systématiquement rejetées notamment le pourvoi en cours contre l’arrêt d’avant dire droit (Add), la demande de citation de nos témoins, notre demande de production de nos pièces, demandes, pour préparer ou discuter les arguments adverses, j’en passe et des meilleurs ». Une autre illustration malheureusement, de la marche arrière du Cameroun, en matière de liberté de la presse.
L’année dernière, lors des élections présidentielles, le pays a connu un record de coupures d’internet. En marge des ces élections, de nombreux journalistes et organes presse ont été victimes des exactions multiples comme des intimidations, des menaces, des agressions, des arrestations et détentions arbitraires. Paradoxalement, Yaoundé vient d’accueillir du 18 au 22 novembre dernier, le 48ème congrès de l’Union de la presse francophone (UPF), avec la participation de 240 hommes de médias venus des quatre coins du monde.
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